Chronique : La servante écarlate

Pour mon cours de littérature, je devais rédiger un avis sur La servante écarlate. Je vous le présente ici.

On dit souvent que les dystopies sont un reflet exagéré de notre société. Hunger Games représente le fossé entre les riches et les pauvres et Player One, l’addiction aux jeux vidéo. La servante écarlate serait donc un reflet de la misogynie et des conditions de vie des femmes.

La servante écarlate est un roman dit de science-fiction dystopique publié pour la première fois en 1985, par l’auteure canadienne Margaret Atwood. On y suit le quotidien de Defred, une servante sexuelle. Le récit se concentre sur ce personnage et ses souvenirs, mais il y a quelques apparitions du Commandant et de son Épouse, les propriétaires de Defred, ainsi que son mari et sa fille, dans ses souvenirs. Cette nouvelle société se situe aux États-Unis, qui ne s’appelle plus ainsi.

La servante écarlate se veut un roman féministe. À mon sens, il ne l’est en rien. Le concept de la servante sexuelle, destinée aux familles riches dont la femme est infertile, est loin d’être une exagération ou une nouveauté. Depuis la nuit des temps, des femmes sont violées pour assurer la descendance d’un homme vieux et riche. À aucun moment l’auteure ne dénonce l’atrocité de ce geste ni ne décrit les émotions de Defred pour nous faire comprendre l’horreur de cette situation. Un lecteur ne comprenant pas le deuxième degré pourrait tout à fait trouver cela normal.

Je trouve aussi que la dévalorisation des femmes et l’espèce de système de castes n’ont pas beaucoup de sens ni de cohérence ici. Ils se basent sur de minuscules extraits de la Bible, pris hors-contexte, pour expliquer leurs propos, alors que ces mêmes extraits n’ont strictement aucun lien avec le concept de dévalorisation de la femme et de reproduction à tout prix. Ce système a été mis en place il y a quelques années seulement, il doit bien y avoir des milliers de femmes qui ont lu la Bible avant que cela ne soit interdit, surtout que les Américains sont très croyants. Aucune ne se rappelle tous les passages signifiant l’égalité de l’homme et la femme, le mal de l’infidélité et du viol ? Aucune ne se souvient des passages parlant de la reproduction, qui n’ont pas du tout le sens que les hommes de cette histoire lui donnent ? Cela me semble impossible. Dans un pays aussi croyant, avec des femmes aussi intelligentes, ainsi qu’une société assez moderne pour les années 1980, il est impossible que la moitié d’une population se soit fait dominer. Elles étaient assez nombreuses pour renverser les hommes. De plus, comme cette mentalité arriérée n’était présente que depuis quelques années, dans le roman, il est impossible qu’en aussi peu de temps, une population aussi immense soit aussi docile. On parle ici d’un pays avec des centaines de millions de personnages. Il aurait fallu plusieurs décennies, même un siècle, pour que le concept soit un peu plus crédible.

La première scène de viol ne m’a pas plu. Chaque individu réagit différemment à une telle atrocité, pourtant même après l’événement, Defred ne semble nullement ébranlée. Soit la scène manque de vraisemblance et de réalisme, soit l’auteure ne décrit pas du tout les émotions. En tout cas, dans la totalité du roman, je n’ai pas su me glisser dans la peau du personnage puisque l’auteure décrit des choses insignifiantes au lieu d’approfondir les émotions et les ressentis de Defred, ce qui est un élément primordial pour un roman de ce genre.

Outre l’invraisemblance du récit, le contenu n’est pas palpitant. On la décrit comme une dystopie, pourtant il ne se passe strictement rien. J’ai survolé bien des réflexions inutiles ou même répétitives, espérant trouver un peu d’action. Mon format de roman a cinq cents pages, l’auteure aurait pu le réduire à cinquante pages tellement il y a peu d’événements intéressants ! Ce livre regorge de descriptions inutiles, de répétitions dans les réflexions et les descriptions. Pour moi, un récit n’a pas besoin d’être aussi explosif qu’un film de Michael Bay, mais la moindre des choses, c’est d’inclure une trame narrative qui intéresse le lecteur.

J’ai également eu beaucoup de difficulté avec le style d’écriture de l’auteure ainsi que la construction de son histoire. Les erreurs de concordance de temps de la traduction française ne m’ont certainement pas aidée à apprécier la lecture, mais les confusions entre les souvenirs du passé, les réflexions du passé de Defred, les moments présents et les réflexions du moment étaient assez dérangeantes. Il était facile de se perdre puisqu’il n’y avait aucun indice d’un changement de temporalité, et j’ai donc fini par perdre tout simplement le fil et l’envie de continuer ma lecture.

En bref, ce roman acclamé est pour moi une immense déception. Non seulement il peut être dangereux entre les mains de lecteurs ne comprenant pas le deuxième degré, mais il manque de cohérence, de consistance, d’émotions, d’explications concernant les liens douteux avec la Bible et de clarté. On ne peut certainement pas considérer cette histoire comme une dystopie, plutôt comme un univers contemplatif dans un monde alternatif reprenant des éléments du passé qui possède d’immenses lacunes, notamment au niveau de la traduction.

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